Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations

Par un après-midi ensoleillé du mois de mai 2000, nous nous trouvions dans une zone industrielle
des environs de Strasbourg, sur le lieu de production des Tuyaux Centrifugés du Rhin.
Cet univers était hostile, rigide, très éloigné de l'ambiance feutrée des salles de danse ou du théâtre.
Des tubes circulaires en béton de formes et de diamètres disparates étaient alignés à perte de vue.
Peu à peu, nous avons investi ces lieux de notre désir de mouvement. Dans les jeux d’ombre et
de lumière, les corps fragiles et souples remplissaient les cavités qui se présentaient à notre regard.
Notre imagination rendait possible la rencontre improbable de l’art dans l’univers industriel.


photos karin hodapp, texte pascale dennefeld, chorégraphie irena tatiboit


Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image 1 - Aline Lemoine, Antoinette Dennefeld
1. Où sont-elles posées
ces danseuses immobiles ?
Dans quel sommeil rêvent-elles ?
Sont-elles mortes ?
Viennent-elles de naître ou d'expirer ?

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image2 - Mylene Lausecker, Aline Lemoine
2. Tout est suspendu,
le souffle et l'instant,
le pas et le mouvement.

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image3 - Aline Lemoine
3. Quels sont ces récipients sans fond
qui les contiennent ?
Matrices béantes dont elles pourraient
tout à l'heure émerger, gicler pour
visiter le monde. Chemins elliptiques
traversés de lumières, creusés
d'ombres, bordés d'énigmes.


Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image4
4. Alvéoles sans opercules dont
peuvent s'échapper ces êtres
aux limites d'eux-mêmes arrivés,
posés sur les marges du temps.

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image5
5. Quel soutien titanesque,
quel écartèlement cosmique
ont-elles entrepris ces amazones,
ces gazelles ? - Et quelles furent
leurs conquêtes ? Est-ce la lutte ou
l'alliance, le fracas ou la palpitation
qui scelleront leur destin ?

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image6
6. Maintenant, les voici qui frémissent.
Elles ne remuent pas. Elles entrent  
dans un rythme immobile.
Elles n'apprennent pas à marcher
comme les petits enfants. Elles sont
bien au-delà de la fonction première.

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image7 - Julie Baumert
7. Elles sont le geste, l'énergie,
la vie, l'Essence.
Elles sont danse et musique et paroles murmurées. Immobiles
et muettes, elles emplissent
l'atmosphère de mouvements,
de sons, de mots.

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image8 - Aline Lemoine, Julie Baumert
8. La pose figée dans laquelle
sont offerts leurs corps n'est
qu'un semblant d'arrêt, une fausse
halte, un demi soupir. La suite
de leur itinéraire hasardeux
s'entrevoit. Elles nous donnent
la danse, l'émotion, le trouble.

Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image9
9. Nous dansons ensemble.
Les joies, les deuils, les morts,
les renouveaux, les espérances,
les forces, les faiblesses,
les voyages et les rêves,
les passions, les peurs,
l'allégresse.
Le Carré d'Art, école de danse à Strasbourg - déambulations - image10 - Aline Lemoine, Antoinette Dennefeld
10. Elles offrent les larmes, les rires,
les chocs et les plaisirs. Elles ignorent
leur pouvoir car elles sont des enfants.
Elles ne savent pas encore que
leur danse est la Vie, le Sens, le Verbe.